Gestion des mots de passe
Protégez vos communications, vos fichiers et vos identités grâce à des techniques issues du monde du renseignement pour verrouiller votre vie numérique.
PROTECTION DIGITALE


Pourquoi vous devez les prendre (beaucoup) plus au sérieux
Un mot de passe est aujourd'hui la clé d’accès principale à presque tout ce que nous possédons en ligne : nos emails, comptes bancaires, réseaux sociaux, intranet en entreprise, services administratifs, stockage cloud, messageries privées... Et malgré son importance celui-ci est encore bien trop souvent pris à la légère. Trop de gens utilisent des mots de passe faibles, trop simples, et identiques sur tous les services qu'ils utilisent. Les mots de passe les plus utilisés restent les dates de naissances, le prénom des enfants, un mix des deux, ou des séries de chiffres du type: 123456, 111111, 123123... C'est une faille énorme que les pirates exploitent évidemment avec méthode et automatisation.
Pour comprendre pourquoi il est vital de sécuriser ses mots de passe, il faut d’abord comprendre comment ils fonctionnent, comment les attaquants les exploitent, et surtout, comment vous pouvez reprendre le contrôle.


Un mot de passe solide et unique pour chaque site
Il arrive souvent que des violations de données surviennent, où des entreprises n'ont pas stocké de manière sécurisée des informations telles que les noms d'utilisateur et les mots de passe. Ces données deviennent alors publiques, et peuvent inclure votre identifiant et votre mot de passe pour certains sites. Un site web qui recense ces données rendues publiques à la suite de telles fuites, Have I Been Pwned, possède actuellement des enregistrements pour 7,8 milliards de comptes. (Sur ce site, vous pouvez entrer votre adresse e-mail ou tout nom d'utilisateur que vous avez utilisé pour vérifier si vos identifiants ont été compromis.)
D'immenses collections de mots de passe volés sont librement disponibles en ligne.
Lorsque ce type de données devient accessible, des pirates informatiques et cybercriminels mènent des attaques dites de « credential stuffing » : ils utilisent les noms d’utilisateur et mots de passe volés pour tenter de se connecter à d’autres comptes — cela peut inclure des comptes bancaires, des messageries électroniques ou encore des services comme Facebook, Twitter ou Instagram. Ils procèdent simplement en testant automatiquement de nombreuses combinaisons jusqu’à en trouver une qui fonctionne sur un autre site. Avez vous déjà été hacké ? Ce site recense toutes les exploitations par des hackers. Vérifier si votre email a déjà piraté ici
Un mot de passe, c’est quoi exactement ?
Un mot de passe est une preuve d'identité. Lorsque vous vous connectez à un service en ligne, vous saisissez une chaîne de caractères censée vous identifier comme le propriétaire légitime du compte. Mais le système ne compare pas ce mot à une version en clair stockée dans une base de données. Il utilise une méthode appelée "hachage" : le mot de passe est transformé en une empreinte numérique unique, qui est enregistrée. Lors de chaque connexion, votre mot de passe est haché à nouveau et comparé à celui qui a été stocké. Cela signifie que, même en cas de fuite de la base de données, les mots de passe ne sont pas lisibles directement.
Mais dans les faits, cette sécurité n’est pas absolue. Si votre mot de passe est court ou commun, il peut être deviné ou "bruteforcé" très rapidement. Et si vous l’utilisez sur plusieurs sites, une seule faille suffit à exposer l’ensemble de vos accès. Un pirate qui récupère votre email et un mot de passe via une fuite sur un site secondaire pourra tester cette combinaison sur Gmail, Amazon, PayPal, Facebook et des centaines d'autres services grâce à des outils automatisés.
Comment les hackers piratent vos mots de passe
Les attaquants d’aujourd’hui ne devinent pas les mots de passe un par un. Ils utilisent des logiciels spécialisés comme Hydra, Hashcat ou John the Ripper, capables de tester des milliers, voire des millions de combinaisons par seconde. Ces outils sont alimentés par des dictionnaires de mots de passe courants, des bases de données issues de fuites réelles, et des règles pour générer automatiquement des variantes typiques, comme ajouter une année ou une majuscule.
Une méthode très utilisée est le "credential stuffing", qui consiste à tester des identifiants récupérés lors de piratages précédents sur d'autres services. Si vous avez utilisé le même mot de passe pour plusieurs comptes, une seule fuite peut permettre de tout compromettre. Le phishing est une autre méthode courante : vous recevez un email ou un SMS vous demandant de vous connecter à un site qui ressemble parfaitement à celui de votre banque, de votre opérateur ou d’un service administratif. En réalité, il s’agit d’une copie frauduleuse conçue pour capturer vos identifiants. D’autres techniques, comme les keyloggers, installent un logiciel espion sur votre ordinateur ou votre téléphone pour enregistrer chaque touche que vous tapez, y compris vos mots de passe. Le simple fait de cliquer sur une pièce jointe piégée peut suffire.


Pourquoi certains comptes sont plus sensibles que d’autres
Tous les mots de passe ne protègent pas la même chose. Certains comptes doivent absolument être considérés comme "stratégiques". Votre boîte email principale, par exemple, permet de réinitialiser les mots de passe de la majorité de vos autres comptes. Si elle est compromise, un attaquant peut tout réinitialiser sans jamais connaître vos mots de passe initiaux. Il en va de même pour votre compte Apple ou Google, qui donne accès à vos contacts, vos photos, votre localisation, votre historique de navigation, et parfois vos moyens de paiement.
Les comptes bancaires, évidemment, doivent être ultra protégés. Mais on oublie souvent que votre smartphone est aussi une cible critique : il contient souvent des sessions ouvertes, des accès rapides à vos applis sensibles, vos documents, et vos moyens de double authentification. Une personne qui accède physiquement à votre téléphone mal protégé peut contourner tous vos autres efforts de sécurité. Enfin, vos comptes sur les réseaux sociaux peuvent être utilisés pour escroquer vos proches, ruiner votre réputation ou vous faire chanter.
Les erreurs fréquentes et leurs conséquences
Prenons un cas réel : Antoine utilise "Antoine1986" comme mot de passe pour ses mails, ses réseaux sociaux et son site de streaming. En 2024, une plateforme de vente en ligne peu connue sur laquelle il avait un compte est piratée. Les hackers récupèrent sa combinaison email + mot de passe. Un script automatique l’utilise ensuite pour tester une centaine d'autres sites. Résultat : les pirates prennent le contrôle de sa boîte mail, réinitialisent l'accès à sa banque, son cloud photo, et se font passer pour lui sur les réseaux sociaux. Il lui faut plusieurs semaines pour tout récupérer, quand c’est possible.
Autre exemple : Sophie note tous ses mots de passe dans l'application "Notes" de son téléphone, sans mot de passe global. Un jour, elle perd son appareil. Quelqu’un le ramasse, devine son code (sa date d’anniversaire, visible sur ses réseaux), et accède à toutes ses données. En moins d’une heure, ses emails, fichiers privés et comptes bancaires sont exposés.


Les vraies bonnes pratiques à adopter dès aujourd’hui
Un bon mot de passe doit être long, unique et difficile à deviner. L’époque des "Léo123" ou "Paris2024" est révolue. Aujourd’hui, un mot de passe doit être composé de 12 caractères au minimum. De nombreux sites vous y obligent, mais une minuscule, une majuscule, un chiffre et un signe devraient toujours en faire partie. . une phrase de passe composée de plusieurs mots sans lien logique est bien plus efficace, par exemple : "SuperPass2025!?? est à la fois mémorable et extrêmement difficile à casser par force brute. Et surtout, chaque compte doit avoir un mot de passe différent. Si cela vous semble impossible à gérer, c’est normal — personne ne peut retenir 50 mots de passe complexes. C’est pour cela qu’il existe des gestionnaires de mots de passe comme MSecure ou 1Password entre autres qui vous permettent de générer, stocker et autofill vos mots de passe de façon sécurisée, sans avoir à les retenir. Une autre solution consiste également a prendre une racine comme Superpass2025 par exemple, puis pour chaque site d'ajouter le caractère "+" et le nom du service. Par exemple Pass2025+Netflix ou Pass2025+Laposte et ainsi de suite.
Cette solution permettent d'éviter les attaques de force brute, mais pas la "filouterie" de quelqu'un qui aurait un accès a voue, et qui pourrait mettre la main sur votre ordinateur ou votre tablette par exemple. C'est pour ça que la double authentification (2FA) est aujourd’hui indispensable. Cela consiste à ajouter un second facteur, souvent un code généré par une application (Google Authenticator, Authy) ou une clé physique comme YubiKey, en plus du mot de passe. Même si quelqu’un obtient votre mot de passe, il ne pourra pas se connecter sans ce second facteur. Cette mesure simple empêche la plupart des piratages automatisés, et ceux des "proches". Évitez autant que possible la validation par SMS, qui peut être contournée via des attaques de type "SIM swap" ou qui pourrait etre temporairement utilisée par quelqu'un qui pourrait voir votre téléphone pendant que vous vous etes rapidement absenté, et qui récupérerai le code malgré l'écran verrouillé si une alerte s'affiche a l'écran.
Quant à votre mot de passe maître (celui de votre gestionnaire, ou celui qui protège votre téléphone), il doit être votre plus solide. Ne le notez jamais sur papier visible, et évitez les prénoms, dates ou lieux personnels. Préférez une phrase aléatoire ou un mot de passe généré avec la méthode "Diceware", qui combine des mots choisis au hasard dans une liste.
Le futur : sans mot de passe ?
La bonne nouvelle, c’est que les grandes entreprises comme Google, Apple et Microsoft déploient déjà des solutions sans mot de passe. Les "Passkeys" reposent sur l’authentification biométrique et des clés cryptographiques stockées sur vos appareils. Vous n’aurez plus besoin de taper quoi que ce soit : une empreinte ou un scan facial suffira. Mais cette transition prendra du temps et elle aussi comporte des risques spécifiques, nous aurons l'occasion d'en reparler.